Les "Nian Hua" de Tianjin
Aujourd'hui, dimanche, il fait très beau et nous sommes déjà à la mi-novembre. Pour profiter de ce temps exceptionnel, nous décidons de partir pour Tianjin, le port de Pékin, joignable en 30 minutes seulement via un train rapide. Ce n'est pas la première fois que nous visitons Tianjin qui, par son architecture, ne ressemble pas trop à une ville chinoise. Jugez plutôt :
A la fin du XIXe siècle et début du XXe, un grand nombre de légations étrangères se sont établies ici. Il en reste de très nombreux bâtiments plutôt bien entretenus.
Mais nous étions curieux d'aller visiter un bourg, appelé Yangliuqing, situé dans la proche banlieue de Tianjin où se fabriquent encore, selon des procédés vieux de 400 ans, des estampes d'un type particulier. Ces dessins sont offerts ou utilisés pour décorer la maison au moment du Nouvel An chinois. Ils sont porteurs de joie, espérance, prospérité et sont de coloration très vive. Ils représentent traditionnellement des scènes de jeux d'enfants.
Le bourg de Yangliuqing vieux de plus de 1 000 ans, était renommé pour ses saules verts, son architecture de style traditionnel et les rives de son canal antique ; et c'est ici que sont nées ces estampes du Nouvel An, tradition vieille de plus de 1 000 ans.
A leur apogée, de 1723 à 1909, il existait plusieurs milliers de modèles d'estampes. Vers 1910, Yangliuqing et les 30 villages environnants étaient appelés le "pays des estampes". Les boutiques alignées recevaient des commerçants de tout le pays. Mais après la Seconde Guerre de l'opium, les choses ont changé et Yangliuqing est tombé dans l'oubli.
Avec le temps, voici ce qu'est devenu le bourg :
Ce bébé joufflu avec une carpe entre les bras et des fleurs de lotus à la main est devenu la représentation classique des estampes du Nouvel An. Comme le mot "poisson" se prononce en chinois de la même façon que le mot "surplus", ce dessin est associé à l'abondance. il est donc de bon ton de l'offrir ou de l'apposer sur les murs pour Chunjie.
Il y a bien encore quelques saules verts le long du canal....
et les promeneurs semblent apprécier l'endroit mais les touristes sont rares.
Ce genre de samovar contient de l'eau bouillante. Il est donc possible de se faire servir un thé bien chaud.
En 1926, la famille Huo issue de ce village a décidé de redonner ses lettres de noblesse à ce fleuron de la culture folklorique chinoise ; et l'activité a repris. Nous avons cherché l'atelier de cet artisan et avons fini par le retrouver. Nous avons été très gracieusement reçus par le responsable actuel, Monsieur Huo Qing, né en 1950 et continuant à former de jeunes apprentis. Il a commencé à dessiner à l'âge de 5 ans et nous a expliqué le procédé des Nian Hua. Il travaille dans un espace minuscule de 10 m2.
On commence par réaliser le croquis :
On grave ensuite ce dessin sur une planche de bois de poirier, très épaisse,
puis on l'imprime sur une feuille de papier spécial et on le peint. Le travail de peinture est la partie la plus longue car très minutieuse mais libre c'est-à-dire que chaque coloriste peut exprimer son propre choix artistique. Ainsi, d'après un même modèle, on peut aboutir à des estampes totalement différentes.
Et voici le résultat final :
C'est une belle tradition mais malheureusement avec l'amélioration du niveau de vie, elle risque de tomber progressivement dans l'oubli.
6 mois plus tard, le 24 mai, j'ai accompagné mon groupe pour découvrir cette vieille tradition. Nous avons passé une excellente journée dans ce charmant endroit en compagnie de M. Huo qui nous a expliqué avec beaucoup de gentillesse et de patience son art.
Avant de rejoindre la gare, nous avons fait un petit tour dans la rue la plus célèbre de Tianjin, la rue de "l'ancienne culture" où l'on peut acheter tout ce qui est artisanat chinois :
Encore un samovar ! Et la boutique des pinceaux de calligraphie.....
Des instruments de musique typiquement chinois que vous ne trouverez pas à Paris......
Et au détour d'un chemin, un adorable petit temple dédié à la déesse des marins. N'oublions pas que nous sommes au bord de la Mer de Chine. Sur l'un des murs, une délicate mosaïque peinte.
Voici l'horloge de la gare ! Il est temps de regagner Pékin après une journée riche en découvertes.