Une Folie chinoise
A quelques kilomètres de l'aéroport de Pékin, un vrai château français, cerné de tous côtés par un golf, apparaît au détour d'un chemin. On a peine à le croire lorsque surgissent, au travers des arbres, cette façade d'un blanc pur et ces toits d'ardoise : il s'agit de la copie du château de Maisons-Laffitte. Un promoteur immobilier chinois, Zhang Yuchen, immensément riche, amoureux de tout ce qui est architecture française et fou d'Occident, a fait le pari de reconstruire sur cette terre d'Asie l'oeuvre de François Mansart. Franchissons les monumentales grilles pour voir de plus près ce qu'il en est...
Cette enfilade de bâtiments, derrière le lac, abrite une piscine olympique et des sources d'eau chaude. Un immense restaurant permet d'accueillir les participants aux séminaires qui se tiennent régulièrement à Zhang Lafitte puisque tel est le surnom donné à cet hôtel.
Voici l'entrée principale avec en bâtiment central la reproduction de Château Lafitte ; les deux ailes sont calquées sur les appartements royaux du Château de Fontainebleau. Il en est de même pour la cour carrée. Mais nous sommes en Chine et les règles du Fengshui exigent des cours carrées fermées. Le problème a été contourné avec la construction de ces doubles colonnades qui sont les copies des colonnes de Bernin à Rome, sur la Place Saint-Pierre.
A gauche, Rome et Maisons-Lafitte, à droite Fontainebleau. La pierre calcaire fait défaut en Chine, aussi un nombre impressionnant de containers ont transporté, depuis la France, de la pierre calcaire en poudre qu'il a fallu ensuite reconstituer et assembler. Un travail de titan ! Les ouvriers et artisans chinois ont été formés sur place par des spécialistes venus de France. Il aura fallu 3 ans de travaux pour achever la construction de cet étonnant édifice.
A gauche, Fontainebleau et à droite le château de Maisons-Lafitte vu de dos.
La réception recouverte de dorures et de marbre est majestueuse comme il se doit. Les décors en bois sculpté et doré ont été réalisés à l'identique. Les dorures sont faites à la feuille et les motifs sculptés à la main.
Les jardins sont aménagés à la française avec des massifs de buis soigneusement taillés.
Devant la façade principale, la reproduction de la Fontaine de Neptune à Florence.
L'immense lustre des salles de réception est en cristal et a été fabriqué à Shenzhen.
Les parquets sont entièrement chevillés. Ces salles sont louées pour toutes sortes d'événements.
La cave où sont stockées des bouteilles de vin de Bordeaux est très chaleureuse. On peut y déjeuner et dîner. Un salon contigu propose des séances de karaoké.
Couloirs et chambres, mobilier et objets de décoration sont copiés sur ceux de Fontainebleau.
Pour l'ameublement des chambres et couloirs, des copies de qualité ont été confectionnés en Chine à partir de modèles acquis en France. Mais quelques pièces ont cependant été importées directement de France. Tapisseries, tissus, bronze, parquets ont été acquis auprès de PME françaises. On peut citer Nobilis et certaines boutiques des Puces de Saint-Ouen.
Pour ne pas perturber le séjour des hôtes fortunés de l'établissement, tous les terrains alentours ont été achetés et l'on y a construit des maisons de très grand standing. Le lotissement ci-dessous s'appelle "La petite Provence". La superficie des maisons varie de 700 à 1 000 m2.
Un peu plus loin encore, l'acquisition des terrains continue car les ambitions de Monsieur Zhang sont énormes. Un projet d'écuries est à l'étude avec chemins équestres autour du château ; il envisage même de créer son propre vignoble.
Que penser d'un tel projet ? Doit-on retirer une certaine fierté de voir les plus beaux fleurons de l'architecture française revivre en Asie ? Pour ou contre ? Ce morceau de culture française fait rêver les Chinois qui n'auront pas l'occasion de voyager en France. Il est aussi l'occasion, pour une certaine frange de clients, de partager un art de vivre de type occidental.